Studio GMLR

D’où parle-t-on ? / studio GMLR édition 2018/2019

« Il y a l’art, qui est un grand tout et au sein duquel cohabitent toutes sortes de pratiques, certaines liées à l’objet, d’autres au langage, d’autres encore au réel, à la fiction, au corps, à la géographie […] Je préfère ces catégories, à inventer, à questionner sans cesse, à celles liées à l’utilisation d’un outil ou d’une technique. »

Dominique Petitgand, City sonic ; les arts sonores de la cité, collectif, lettre volée, Bruxelles. 2015.

Au centre de toutes ces catégories, il en est une qui reste plus que jamais « à inventer, à questionner sans cesse » : la voix, les sons que nous produisons grâce à nos cordes vocales.

L’homme doit, par la force qui est derrière la corporalité, mouvoir aussi la corporalité de son environnement, avec le flot d‘air qui est mû à travers la trachée-artère, qui est pressé à travers le larynx, et qui entre dans d‘autres organes du langage (la langue, le palais, les dents, l‘espace de la bouche). Il doit «sculpter» quelque chose à l‘intérieur de ce flot d‘air. Le récepteur doit « exformer » cette sculpture.“

Joseph Beuys, « L‘Entrée dans un être vivant », documenta VI, 1977.

Plus que les données physiologiques, ce sont les sources multiples de ce « flot d’air » qui nous intéressent. D’où parle-t-on ? Pourquoi certains parlent-ils tellement et d’autres si peu ? D’où Salvador Allende tira-t-il la force de qualifier posément le timbre de sa voix dans sa dernière intervention à la radio alors même qu’il se préparait à mourir ? Comment telle personne sortie du coma devient-elle capable de parler couramment une langue dont elle ne connait que des fragments épars ? Qu’est-ce qu’une langue agglutinante ? Comment Bernard Heidsieck choisissait-il de dire sa poésie debout ou assis ?…

Ces quelques interrogations ne sont qu’un infime échantillon des questions que pose la voix. Les arts sonores eux-mêmes hésitent parfois à s’aventurer sur ce terrain, comme si le plus commun des outils continuait d’impressionner malgré des millénaires de culture(s) orale(s). L’objet de ce workshop de deux semaines est d’explorer ce terrain à la fois si ordinaire et si mystérieux. Une exposition viendra en conclusion proposer quatorze propositions – quatorze façons de poser cette question lancinante et inépuisable : d’où parle-t-on ? 

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